Alouette : la radio qui monte, qui monte…
mars 24, 2011 1 Comment
Pour la première fois dans l’histoire de Médiamétrie*, une radio régionale, Alouette, apparaissait en janvier dernier dans le relevé d’audience nationale (Médiamétrie, 126.000, nov-décembre 2010). Avec plus de 530.000 auditeurs par jour, la radio de Bertrand de Villiers passait en effet la barre du point d’audience national, au-delà duquel on entre dans la cour des grands. Quels sont les secrets du directeur des programmes ?
Il garde le triomphe modeste, Sébastien Lebois. « C’est le travail d’une équipe. Vraiment. Nous avons choisi un cap, on l’a tenu, et depuis 9 ans, on y travaille tous les jours ». Ce jeune quadragénaire s’astreint quotidiennement à tenir une triple promesse. Avec son équipe, donc.
1/ Une programmation musicale sur-mesure !
« Nous ne faisons pas du sous-NRJ, ni du sous-Virgin. Nous avons notre identité propre, nous ne voulons pas jouer la même programmation musicale que les autres ». Ainsi donc, parmi les premiers leviers qu’actionne Sébastien Lebois se trouve… la programmation musicale. La base. Comme au bon vieux temps des années 90, quand Internet n’avait pas fait irruption dans notre quotidien. Mais attention : avec l’humain en plus !
« On est une radio de TOP 40, oui, mais à notre façon. Nous avons calibré un sélector très précis, très exigeant. Chaque moment de la journée a ses nuances. (…) Nous réalisons les études musicales indispensables (auditoriums, call-out, qui permettent de tester chaque titre auprès d’un échantillon représentatif du public-cible de la station, ndlr), mais sans nous y fier aveuglément. D’abord, je ne teste pas tout ce que je diffuse. Avec l’équipe, nous prenons des paris en fonction de ce que nous inspire un titre. Nous nous autorisons à jouer un morceau… juste parce qu’il nous plait. Et puis nous ne tenons pas toujours compte de ce que dit le panel. Il nous arrive de continuer à jouer un titre « brûlé » (à propos duquel le panel exprime un ras-le-bol, ndlr), parce qu’on estime qu’il doit encore être joué, qu’il est dans l’air du temps. »
Cette fibre musicale, c’est la marque de fabrique du directeur des programmes. « J’ai été pendant 5 ans deejay en club. Les quadras d’aujourd’hui, qui sont notre cœur de cible, j’ai eu bien le temps de les observer sur les pistes de danse lorsqu’ils avaient 20 ans de moins. Je sais ce qui les a fait bouger, je sais ce qui leur plaira aujourd’hui ! »
2/ Juste l’info qu’il faut, au bon public, au bon moment
Pour une régionale, l’info est très importante, et Sébastien Lebois le confirme. Mais il préfère le qualitatif au quantitatif. « Oui, bien entendu, l’info est très importante. Mais je préfère que les flashes soient donnés sous des formats très courts, qu’on aille droit à l’essentiel, un peu à la façon du 6 minutes de M6 ».
De fait, Alouette donne chaque jour 90 bulletins d’information à l’antenne (en additionnant les différentes zones de diffusion). C’est loin d’être négligeable. « A certaines heures, ces flashes sont décrochés par département. Ce qui nous permet de donner des bulletins d’infos dédiés à des bassins de vie précis. Nous avons un vrai souci de crédibilité. Court ne veut pas dire bâclé : l’info est très importante, il ne faut pas passer à côté du bon sujet ! » Juste l’info qu’il faut, au bon moment et au bon public, telle est donc la ligne éditoriale (très résumée) d’Alouette. « Nous avons la chance d’avoir une vraie crédibilité au niveau de l’info. Auparavant, Alouette FM –le FM a disparu depuis de notre nom- était beaucoup plus axée sur l’information. En 95 la ligne d’antenne a évolué pour devenir plus musicale. » Qui peut le plus peut le moins : de fait, la radio a gardé sa culture info, ses réseaux régionaux, son savoir-faire. Elle sait « faire court » en gardant un niveau d’exigence élevé, et une vraie crédibilité.
3/Animer l’antenne, suivre l’auditeur, exposer la marque !
Sébastien Lebois tient à ce qu’il se passe toujours quelque-chose à l’antenne. « On travaille quotidiennement sur de nouveaux « propos d’antenne » à donner chaque jour. Une radio ne doit pas ronronner, il faut la faire vivre. Alors on s’astreint à monter chaque semaine une opération thématique, ou un jeu qui parle à l’auditeur, qui l’accompagne dans son quotidien. »
Parmi les opérations dont il est le plus satisfait, il y a eu « Alouette rembourse vos impôts » au moment où les contribuables recevaient la douloureuse. En décembre, « Alouette vous paye un 13ème mois » a très très bien fonctionné aussi. Le radio-guidage en temps réel et l’alerte radar (incontournable aujourd’hui dans la plupart des radios de proximité) font évidemment partie de l’arsenal.
Mais Sébastien essaye, à chaque fois que c’est possible, d’aller encore plus loin :
« Certaines opérations ont eu un impact encore plus fort. Notamment « Alouette vous offre le permis » à la faveur de laquelle nous avons déposé des affichettes promo dans toutes les auto-écoles de la zone de diffusion. On a aussi pu faire gagner une étape du tour de France dans la voiture du directeur sportif, et là, notre affichette était présente dans tous les clubs de vélo de la zone ! »
Un travail de bénédictin, mais qui a évidemment renforcé l’ancrage local de la radio, sa présence terrain, et sa « complicité » avec l’auditeur. « J’ai d’ailleurs décidé, il y a deux ans, de créer un poste de chargé de promo à plein temps. C’était un vrai investissement, mais… ça a payé. ».
Suivre l’auditeur partout où il se trouve, c’est aussi bien entendu travailler sur le web. « Alouette a été la première radio régionale à offrir gratuitement l’écoute en streaming haute qualité sur le site web. J’ai toujours voulu considérer l’Internet comme un émetteur à part entière, et le traiter avec la même exigence de confort d’écoute que n’importe quel autre site de diffusion ! » Cette exigence se retrouve bien entendu aujourd’hui aussi sur les applications smartphones.
« L’audience de la radio, on la monte par les escaliers, on la descend en ascenseur! »
Sébastien Lebois n’a pas la prétention d’avoir trouvé une recette miracle. « Je n’invente rien ! Je ne fais que suivre et adapter ce que certains grands noms de la radio nous ont laissé comme exemple. Parmi mes principaux modèle, se trouve Max Guazzini (ancien directeur des programmes et vice-président de la radio NRJ, aujourd’hui patron du Stade Français, NDLR). Aujourd’hui, nous avons du succès, mais tout ça est très fragile. L’audience de la radio, on la monte par les escaliers, on la descend en ascenseur ! »
Il n’a pas la grosse tête, Sébastien Lebois. Et pour expliquer la réussite d’Alouette, qui a tout de même pris 130 % d’audience en 9 ans (il en a la direction depuis 2002), le directeur des programmes de la première régionale de France veut surtout rendre hommage à son équipe, et à la stabilité qui y règne. « Il y a ici 37 salariés. Et notre politique de ressources humaines consiste avant tout à essayer de garder les gens : nous misons sur l’avenir en investissant sur les gens qui font Alouette. »
Et en grandissant, les gens d’Alouette font forcément grandir la radio.
Jean-Charles Verhaeghe
*L’une des premières fois, en réalité. Alouette avait déjà atteint le point d’audience l’été précédent, mais le sondage de l’été ne compte pas dans le calcul annuel d’audience. Et par ailleurs, pour figurer dans le communiqué, il faut avoir souscrit au sondage. C’est un pari, et un véritable investissement. Sébastien Lebois a considéré qu’il pouvait tenter « cette vague » et il a eu raison. A notre connaissance, une seule autre radio régionale avait atteint et dépassé le point d’audience nationale, mais n’avait pas souscrit. Elle n’a donc pas pu, et ne peut toujours pas, être citée dans les résultats nationaux.
Archives
[...] Après Alouette, qui a pu atteindre l’an dernier des scores d’audience de niveau national (article à lire dans nos archives), Hit West a gagné 110.000* auditeurs en deux saisons sur ses fiefs de Bretagne et Pays de Loire. [...]